Un peu d’histoire…

La génèse de l’atelier du clavecin moderne

Epinette Sassmann

L’Atelier du clavecin moderne est né de la rencontre entre Jean-Pierre Rubin et Pascal Roy, créateur de la Maison Piano Roy, installée à la Croix-Rousse et spécialisée dans la restauration et la vente de pianos d’occasion d’exception.

Jean-Pierre Rubin est un passionné qui a découvert le clavecin à l’âge de 7 ans. Une rencontre qui a orienté sa vie. Quelques années plus tard, il prend des cours avec la claveciniste lyonnaise Denise Balanche. Il joue alors sur le clavecin Pleyel de son enseignante. Il est fasciné par ce timbre si particulier et la diversité des sonorités. Il s’intéresse alors aux clavecins modernes sans pour autant délaisser les clavecins historiques. Très vite il se rend compte que ces instruments ont besoin de soins et de restauration, tâche à laquelle il s’attelle avec passion.

Et c’est ainsi que Jean-Pierre Rubin et Pascal Roy décident de créer L’Atelier du Clavecin Moderne, afin de donner une nouvelle vie à ces instruments.

Il était une fois le célèbre « faux clavecin de Bach »

Selon une légende qui remonte au XIXe, le clavecin conservé au musée de Berlin portant le numéro de catalogue 316, attribué à Johann Heinrich Harraß a longtemps été considéré à tort comme le clavecin de Bach. Cet instrument avait été acheté en 1890 par un collectionneur hollandais Paul Witt persuadé, sans raison objective, qu’il avait appartenu à Bach. Le musée en fit ensuite l’acquisition et le directeur de l’époque, Oskar Fleischer, certifia son authenticité, rajoutant qu’il avait été offert au musicien par son fils Wilhelm Friedmann… En 1899, le facteur Wilhelm Hirl (Berlin) exécute la première copie de ce clavecin pour un collectionneur. D’autres suivront. La facture allemande est de fait basée sur cet instrument, nommé le « Bach cembalo » dans les catalogues.

De nouveaux instruments en France

Erard

En 1882, Louis Tomasini restaure le clavecin de Pascal Taskin daté de 1769 – conservé aujourd’hui à la Russell Collection d’Edimbourg – alors encore en possession de la famille Taskin. Peu de temps après la maison Erard emprunte l’instrument afin de réaliser une copie qui sera présentée à l’exposition universelle de 1889. Extérieurement, l’instrument ressemble aux modèles anciens. En revanche, il n’a pas de fond et possède un barrage plus lourd, des chevalets et un cordage plus épais. Les sautereaux sont en bois et les becs en cuir sauf l’un des deux 8′ qui est en plume.

Pleyel

Peu de temps après ErardPleyel emprunte l’instrument de Taskin et réalise son premier clavecin, sous la direction de Gustave Lyon, en 1888.  Ce nouveau né d’aspect très rococo avec son piétement Louis XV et son abondante décoration, s’éloigne un peu plus de l’original que celui d’Erard. Il possède des claviers de piano, six pédales, un jeu nasal inspiré des instruments anglais Comme ErardPleyel renforce la caisse par un barrage lourd et augmente la taille des chevalets et du cordage. L’instrument ne possède également pas de fond. Les sautereaux en bois sont munis d’étouffoirs classiques et les becs sont en cuir. Le Grand Modèle de Concert, tel qu’il est nommé dans le catalogue Pleyel, sort en 1912 . En 1927, Pleyel sortira un nouveau modèle inspiré du Grand Modèle de Concert, mais dépourvu du jeu de 16’ et par conséquent plus petit en taille et en étendue.

Gaveau

A partir de 1911, la maison Gaveau ouvre un département consacré aux instruments anciens, dont Arnold Dolmetsch assure la direction ; ce dernier venant de quitter la firme bostonienne Chickering & Sons où il occupait un poste similaire. La collaboration Dolmestch – Gaveau durera quatre années, au cours desquelles clavecins, épinettes, virginals et clavicordes seront fabriqués. Les modèles proposés seront similaires à ceux conçus par Dolmestch chez Chickering. Les clavecins conçus par Dolmestch possèdent quatre jeux – dont un jeu de 16’ – un jeu de luth sur chaque 8’ et six pédales. Les sautereaux sont en bois et les becs en cuir. Après le départ de Dolmestch,  Gaveau poursuivra ce département jusque dans les années trente.

Tomasini

Après avoir restauré en 1882 le clavecin de Pascal Taskin daté de 1769 et celui d’Andreas Ruckers daté de 1646 – ravalé par Taskin en 1789, Louis Tomasini construit pour l’Exposition Universelle de 1889, un instrument qui peut être considéré comme la première « copie » de clavecin ancien.

De nouveaux instruments en Angleterre et aux États-Unis

Arnold Dolmestch

Parallèlement à ses recherches musicologiques et à ses activités de professeur, de conférencier, et d’interprète, Arnold Dolmetsch s’intéresse à la facture instrumentale.Après avoir restauré un certain nombre d’instruments anciens – violes, luths, épinettes, clavicordes et clavecins – il conçoit de nouveaux modèles basés sur les instruments qu’il vient de restaurer. En 1894, il réalise son premier clavicorde puis, en 1896 son premier clavecin. Il multipliera ensuite les créations.

Thomas Goff

Thomas Goff crée son atelier en 1933. Ce mélomane, après avoir entendu Violet Gordon-Woodhouse au clavicorde, est littéralement envoûté par cet instrument et décide d’abandonner le droit pour se consacrer à la facture instrumentale. Ses clavecins s’inspirent, dans leur ligne et leur décoration, des modèles anglais du XVIIIe siècle. Pour le reste, ils demeurent de conception moderne : structure lourde, cadre en fonte, pédales, jeu de 16 pieds et becs en cuir sauf pour le 8’ nasal supérieur.

John Challis

John Challis découvre à l’âge de 19 ans le clavecin, lors d’un concert donné par Wanda Landowska à Ypsilanti, ville où il grandit. Il part aussitôt en Angleterre travailler chez Dolmetsch pendant quatre années. A son retour en 1930, il crée à New York son propre atelier de facture de clavecins et de clavicordes. En 1946, Challis installe son atelier à Détroit où il y restera jusqu’en 1960 . Durant toute son activité professionnelle, il cherchera à améliorer la facture instrumentale en appliquant des techniques nouvelles et en utilisant des matériaux modernes tels que l’aluminium pour le barrage, la table d’harmonie et les chevalets, le nylon pour les languettes, le caoutchouc et le plastique pour les becs et le plexiglas pour le sommier.